Georges Séguy : "La grève n’est pas une invention perverse du syndicalisme"

Georges Séguy : "La grève n’est pas une invention perverse du syndicalisme"

Membre du syndicat des cheminots de Toulouse (Haute-Garonne) à la Libération, Georges Séguy a été secrétaire général de la fédération CGT des cheminots de 1961 à 1965, avant d’occuper le poste de secrétaire général de la confédération jusqu’en 1982. Pour« l’Humanité Dimanche », il livre son analyse du projet de loi contre le droit de grève.

HD. A-t-on déjà connu de pareilles atteintes au droit de grève ?

Georges Séguy. Oui, sous Pétain, avec la charte du travail, qui prétendait soumettre les syndicats à l’autorité de Vichy. Mais aussi sous la Ve République, quand, au début de son premier mandat, le général de Gaulle a décrété une restriction qui instituait un préavis de 5 jours avant toute grève. Un autre décret autorisait les ministres chargés des personnels de la SNCF, de la RATP, d’Air France, d’EDF et GDF d’user de réquisitions en cas de grève. Un an après, en avril 1963, les mineurs en grève déchiraient et brûlaient sur le carreau des mines les ordres de réquisition signés Charles de Gaulle et Georges Pompidou. En mai 1968,10 millions de travailleurs cessaient le travail et occupaient les entreprises, sans se préoccuper des fameux 5 jours de préavis. Ce simple rappel de l’histoire devrait donner à réfléchir aux actuels adversaires du droit de grève qui envisagent un passage en force, au mépris de l’intersyndicale.

HD. D’après vous, de telles mobilisations sont-elles envisageables aujourd’hui ?

G. S. Aussi peu de temps après le résultat de l’élection présidentielle, cela paraît difficile. Mais les choses peuvent évoluer très vite. Je pense que l’opposition des trois principales centrales syndicales devrait inciter le gouvernement à revoir sa copie. Quand on sait que 90 % des perturbations de la circulation ferroviaire sont d’origine technique ou consécutives à l’insuffisance du personnel, on comprend mieux que le prétendu service minimum n’est en vérité qu’une hypocrisie destinée à dresser les usagers des services publics contre les personnels de ces services. Si je puis me permettre, il est d’ailleurs surprenant que l’aversion de Nicolas Sarkozy envers le droit de grève ne lui ait pas encore donné l’idée d’une règle inédite, qui irait jusqu’au bout de sa singulière logique : que les avantages abusivement obtenus, sous la pression d’une grève, ne bénéficient plus aux salariés qui auront le courage et l’honneur de ne pas la faire ! Car le but du président de la République est évident : restreindre le droit de grève aujourd’hui dans les transports, demain dans l’enseignement, puis dans toute la fonction publique, pour finir par le secteur privé. Nous en reviendrions ainsi plus d’un siècle en arrière, à l’époque où la grève était illégale. Voilà pourquoi la solidarité interprofessionnelle, que l’on retrouvera lors des manifestations du 31 juillet, a tant d’importance.

HD. Quelles grandes conquêtes ont été gagnées grâce à la grève, y compris quand celle-ci était minoritaire ?

G. S. Le succès d’une grève ne se mesure pas au nombre de grévistes qui y participent mais plutôt aux résultats qu’elle obtient. Il est des grèves dites minoritaires qui aboutissent à des résultats positifs, dont l’ensemble des salariés bénéficient. Cela dit, la plus forte participation possible est l’une des conditions d’un compromis avantageux. Je me souviens très bien qu’en 1968, nous réclamions une augmentation du SMIG que le gouvernement et le patronat considéraient ruineuse pour l’économie nationale et catastrophique pour l’équilibre monétaire européen. Or, en moins de 24 heures et sous la pression des 10 millions de grévistes, nous avons obtenu une augmentation de 35 % pour l’industrie et de 50 % pour l’agriculture.

HD. « La négociation est moderne, la grève archaïque. » Que répondez-vous à cela ? G. S. Que la grève n’est pas une invention perverse du syndicalisme. Elle éclate quand l’injustice dont souffrent les travailleurs devient trop insupportable, qu’ils n’ont pas d’autre façon de réagir. Évidemment, on ne peut pas penser la stratégie de défense des travailleurs aujourd’hui comme à la naissance de la CGT, en 1895. Beaucoup de choses ont évolué. De ce point de vue, les vieilles idées selon lesquelles une bonne grève générale (dont on ne fixe même pas les objectifs) serait le meilleur moyen de se débarrasser du capitalisme sont dépassées ; Mai 68 l’a largement prouvé. Mais quand la question de la grève est posée, elle ne se pose pas uniquement aux organisations de travailleurs mais aussi au patronat. Le MEDEF envisage-t-il vraiment des relations sociales plus modernes que par le passé ?

entretien réalisé par V. Bordas vbordas@humadimanche.fr et E. Dimicoli edimicoli@humadimanche.fr

De : L'HUMANITE DIMANCHE
lundi 30 juillet 2007

Comments

[NOSE DE CHAMPAGN]

Juliette et Francis, je vous considère comme frère et soeur de luttes. Voilà! Pour moi, on ne peut pas être communiste sans "mettre en commun" et sans partager la fraternité à égalité et librement. C'est mon idéal et ma façon de vivre...
Donc, je ne peux que vous dire que je suis très honoré de votre présence ici qui donne de la vie à ce blog.
À ciao et fraternité,

NOSE.

[Juliette]

Cher Francis,
Merci pour ta compréhension. Effectivement, j'ai fait plusieurs tentatives pour me rapprocher du PCF, mais il y a toujours eu quelque chose pour m'entraver dans ma démarche. En ce moment, c'est vrai, c'est l'attitude de certains sur Bellaciao qui me donnent une vision très fermée, voire sectaire du communisme.
Pourtant à lire certaines personnes comme Nose, Claude ou VSB, je me dis que j'ai pas tout vu, ni tout entendu.
C'est étonnant, mais si on devait faire un pourcentage des attitudes, je retrouve les mêmes proportions autour de moi, une forme de sectarisme et au milieu quelqu'un d'ouvert, de généreux, mais qui a quitté le PC, en désaccord avec la direction. C'était à l'époque Mittérand ! Si je l'avais rencontré avant, sans doute que j'aurais adhérée.
Mon mari et moi avons perdu de vue des amis communistes, qui ont émigré de Bordeaux vers Montreuil : Jean-Paul et Marie ARM...AC.
Jean-Paul et mon mari avaient monté la CGT dans une boîte sous-traitante d'Ibm. Enfin, c'est tout un roman, qui nous a laissé de bons souvenirs.

J'espère que le PCF va porter tous ses efforts pour montrer une autre image de lui-même, attrayant, moderne, jeune d'esprit, avec une capacité à l'alternance, une fois dégagé de la gangue "soviétique" qu'on veut lui faire encore porter. Je ne te cache pas que mon fils (20 ans) semble attiré par le communisme et il y a tout de même des antécédents familiaux.

Bon, comme je dois aller faire des courses, je te laisse à tes confitures (faut que j'en fasse d'autres moi aussi. Ca me fait penser à "la cigale et la fourmi"...) !

Merci Nose de nous laisser squatter ton blog. Qui sait s'il ne deviendra pas un véritable forum libre...

Bisous à tous les deux.
Juliette

[Francis d Quincy]

Chère Juliette,

Tout d’abord j’espère, ami Nose que tu ne nous en voudras pas de squatter ainsi chez toi, mais, le videur du Fou de Bassan nous ayant virés comme des malpropres, notre première idée a été de nous rabattre sur le « Merle Moqueur », endroit chaleureux idéal pour poursuivre nos conversations…

Vois-tu Juju, pour ce qui est des freins à ton engagement, - et je partage ton opinion sur le respect mutuel et la liberté d’expression - je ne crois pas qu’il faille juger le PCF au travers de ces personnes (d’ailleurs je ne pense pas que R. en soit membre).

En ce qui me concerne, je ne suis plus au PCF depuis une dizaine d’années, après avoir été adhérent pendant 30 ans et avoir exercé quelques responsabilités. Cela ne m’a pas empêché de participer aux campagnes présidentielles et législatives (je suis d’ailleurs systématiquement invité aux réunions de cellule et de section). Aujourd’hui, je me pose la question de ma ré-adhésion, mais je veux me donner un peu de temps car ma crainte serait d’adhérer à un parti appendice du PS.

Le comportement de certains (à qui le qualificatif de « stalinien » - qu’ils envoient à travers la figure de beaucoup de copains - s’appliquerait si bien) tend non pas à m’éloigner, mais au contraire à me donner envie de militer à nouveau pour combattre ces pratiques néfastes et qui ont tant nui à notre idéal.

Je tire une leçon de nos déconvenues actuelles : ne pas oublier le lieu de débat préparatoire au congrès de décembre du PCF. Un site a été ouvert dans ce but (immédiatement démoli par LL qui prétend que Bella est le seul lieu de débat des communistes) et je me rends compte que je n’y ai toujours pas participé ! Dès demain, je vais réparer cette erreur et vous invite à en faire autant (les non adhérents sont bienvenus…).

Bon, ma bassine de confiture de mirabelles est terminée (c’est ma troisième, et je vais en faire encore autant) et il est temps de se reposer les yeux !...

Bises,
Francis

P.C. : mes excuses Nose pour la double publication de mon 1er commentaire (un appui sur le bouton "rafraîchir" du navigateur, et c'est reparti)...

[Juliette]

Cher Francis, et cher Nose,
T'en fais pas, je suis victime aussi des coups de ciseaux de R., et il est impossible de discuter avec LL, qui dit parfois des énormités, qui tente de s'imposer à son interlocuteur, qui ose dire : "j'ai raison" (voir son article d'aujourd'hui), mais silence faut pas lui dire, sous peine de prendre des insultes ou des coups de ciseaux, voire une interdiction de poster, c'est le cas aujourd'hui.

Et entre nous, c'est pas comme cela qu'ils donneront envie au gens d'adhérer au PC. Je fais partie de ces gens qui hésitent à s'engager, car pour moi, le couple liberté d'expression/respect mutuel sont indissociables. Cela suppose, c'est vrai, un travail sur soi pour accepter d'écouter ce l'autre a à dire et amener (l'un ou l'autre) à élargir son horizon ! Il faut que le communisme ose offrir un visage moderne, par opposition aux schémas qu'on nous a mis dans la tête, malgré nous,(médias - bloc soviétique, etc...) pour offrir des perspectives d'avenir aux citoyens de gauche et même à ceux qui sont allés se perdre du côté de Sarkozy.

Je suis donc censurée par R. pour avoir dit ma sympathie pour Claude et Pedro, et pour avoir suggéré un forum entièrement libre. Pour ce qui est de Claude, s'il aime la corrida, c'est son problème. S'il m'en parle, je le questionnerai pour essayer de comprendre, puis je tenterai de lui transmettre mon émotion devant une telle scène, de façon à l'amener à voir autrement !

Hercule (comme R. ou Léa) m'inquiète sur sa façon d'aborder le problème de la corrida. Si je le comprends bien il rejetterait "son frère" parce que ce dernier serait un aficionado de la corrida ? Quel extrémisme ! Et le dialogue c'est fait pour quoi alors ?

Dommage de laisser filer des personnes de qualité, comme Danièle Bleitrach, Roger de Bretagne, Claude, et autres, car il est toujours regrettable de se priver d'échanges de points de vue qui nourrissent la réflexion et qui permette d'avancer vers la compréhension des autres.

A +
Bises gasconnes à tous les deux.
Juliette

[Francis d Quincy]

Cher camarade Nose,

Tout d’abord je me réjouis que tu aies repris l’article de l’HD que j’ai publié sur BellaCiao ; mes interventions sur ce site tendent depuis quelques semaines à se limiter à cela, et sans faire apparaître mon nom : publications d’articles repris de l’Huma, de l’HD, du site PCF,…

En effet, et j’en viens à l’objet de ce message, je voulais te faire part de la censure dont je suis, tout comme Claude et bien d’autres, victime sur ce forum.

A titre d’exemple, voici le message que j’ai tenté de publier hier soir en réponse à JMH http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=51260#forum182320 :

« Jean-Michel,

Je me joins à toi, (moi qui « n’ai strictement rien à foutre des corridas », et qui suis même contre ce que je considère comme un voyeurisme sadique…) pour saluer cet article intelligent et qui nous change des propos sectaires et indigents sur ce sujet.

Pedro nous donne à réfléchir sur un phénomène dans ses dimensions rituelles et sociales.

Mais, à la lecture de certains commentaires, je ne te cache pas que je suis inquiet pour l’idéal qui nous fait combattre car je suis horrifié que l’on puisse à ce point se tromper d’adversaire.

Le débat que nous souhaiterions ici à mille voix risque de se terminer lamentablement en dialogue (parce que je suis optimiste !...)

Je préfère ne pas commenter l’adjonction des vidéos à la suite du bel article de Pedro…

Francis de Quincy »

Cette tentative m’a valu d’être interdit de publication… (adresse IP sur « liste noire »).

Cela m’attriste profondément, car ce que je croyais être un lieu de confrontations d’idées avec un objectif commun me semble devenir enjeu de pouvoir au bénéfice de quelques uns (je ne sais comment l’expliquer : luttes internes au sein de PRC et de sa délégation parisienne, question de personnes ???).

Le débat est de plus en plus confisqué par quelques personnes (en particulier LL, qui, même si ses interventions sont souvent intéressantes, exerce une sorte de terrorisme verbal, et à qui il ne faut surtout pas porter la contradiction, sauf à risquer de passer entre les cisailles de R.), des communistes étant censurés tandis certains, aux objectifs parfois troubles, peuvent continuer à nuire en déversant leur flot de « pensée critique » («V.» n’a pas été assez malin pour comprendre qu’il n’avait pas le droit de s’attaquer à LL).

Si je m’adresse à toi, c’est parce que tu es de ceux que j’ai plaisir à rencontrer sur ce site, que j’apprécie tes écrits qui montrent tes convictions communistes, ton humanisme et ton érudition et que, si j’en crois ton commentaire (25 juillet 2007 - 10h28) à un article de la Louve (QU’EST CE QUE LA CENSURE ?), tu ignores l’ampleur de ce phénomène sur BellaCiao.

J’espère pouvoir encore longtemps avoir le plaisir de te lire…
Prends bien soin de tes tomates… et de toi-même !

Bien fraternellement,

Francis Giuntini, dit Francis de Quincy