LE SILENCE DU FLEUVE...
C'est dimanche aujourd'hui... Le 19 mai... On a l'impression d'être le 19 novembre: la grisaille est partout et nous avons dû maintenir le chauffage.
Je viens de terminer le dernier livre d'Henning MANKELL paru en avril 2013 au Seuil, en collection "Points" (N° P. 3011): "L'oeil du léopard". Cela se passe alternativement en Suède (dans les environs de Lulea), et en Zambie (dans les environs de Kitwe (dans le Copperbelt) à Kabwe et Lusaka. Ces transferts ont lieu alternativement en fonction des différents moments du récit, qui sont d'une part la jeunesse du héro et d'autre part son époque d'homme mûr.
H. MANKELL nous brosse son tableau d'une partie de la zone centrale de l'Afrique, dans la bande tropicale (du Capricorne), après l'accession à l'indépendance. C'est la vie dans une période transitoire où les colons, dans leurs immenses fermes, sont sur la défensive face aux populations noires. Ces dernières supportent de moins en moins les rapports d'exploitation articulés à un système raciste, tandis que le pouvoir noir de la capitale est marqué par la corruption de l'Etat de la base au sommet... L'auteur aborde les réalités troubles (avec la pornographie et la prostitution des mineures) des programmes d'aide et de coopération au développement, de certaines ONG, notamment suédoises, dans ce système corrompu...
En celà, Henning MANKELL le suédois, rejoint curieusement les descriptions de Jo NESBÖ le norvégien dans "Le léopard" (Folio N°659, paru en avril 2012), dont le héro Harry Hole s'aventure surtout au Congo (RDC), dans la région des grands lacs au milieu de trafics divers et variés, allant des armes aux pierres précisieuses en passant par la course aux minerais technologiques du type coltan...
Deux livres extrêmement passionnants, pour traverser la saison des pluies que nous subissons en ce printemps 2013... De l'Afrique australe à l'Afrique du Nord, le pas est vite franchi...
En effet, dans une température atteignant à peine 13 degrés cet après midi, j'ai regardé le très sobre et émouvant film documentaire d'Agnès DENIS et Medhi LALAOUI (1991) sur la manifestation de la Fédération de France du FLN, le 17 octobre 1961 à Paris. Ce film, "Le silence du fleuve", dure 52 minutes environ.
http://www.mediapart.fr/content/17-octobre-1961-le-silence-du-fleuve
Quand on pense que moins de 19 ans après la rafle du Vel d'Hiv, sous la supervision du Préfet Papon qui avait déja participé à l'organisation de la déportation des juifs de France (depuis Bordeaux en 1942), c'est au massacre et à la déportation algériens de France que ce même monstre s'est attelé avec une police parisienne toujours aussi peu vaccinée contre les réflexes barbares...
Cela me ramène à l'indigne et inadmissible polémique initiée il y a maintenant des mois sur "le Pigeon Bleu", concernant les rapports entre le MTLD-MNA, le FLN et les communistes. Dans le film dont je viens de parler on ne fait pas la moindre allusion aux communistes et à leur position sur l'Algérie, alors qu'on est en 1962 et que l'histoire a déjà tranché et obligé à des choix. On a les témoignages de Maspéro, Bourdet, etc., et... G. Monate qui distille subrepticement son venin à l'égard de la CGT de la RATP... Mais de communistes, point. C'est là qu'il faut faire une excursion minutieuse et prolongée sur le site d' "Alger Républicain", et accessoirement sur celui du Parti de Gauche. On y rappelle le rôle essentiel de Georges Acampora, notamment lorsqu'il s'est agi en 1955 de faire la jonction entre les CDL (bras armé du PCA) et le FLN. On y rappelle les sacrifices inouis consentis par les camarades du PCA (en proportion de leur nombre) pour la libération de l'Algérie, 10 ans après la libération de la France. Nous ne pourrons pas tous les énumérer, mais tout de même, à travers les figures les plus connues, cela permettra de rendre l'hommage aussi aux humbles et à empêcher l'oubli. Donc, honneur à nos camarades, Docteur Georges Counillon, Professeur Maurice Audin, Henri Alleg, Aspirant Henri Maillot, Raymonde Peschard, Fernand Yveton, Danielle Minne, Annie Steiner, Zoulikha Inal, Tayeb Malki, René et Jocelyne Chatain, Yahia Briki, Jean Farugia, Abdelkader Guerroudj, Félix Coluzzi, Abdelkader Guernaz, Mohammed Dib, Mohammed Khadda, Anna Gréki, les poètes Bachir Hadj-Ali, Jean Sénac et Yacine Kateb... Ils étaient communistes. "Ils ont rejoint le Front" et furent résistants et combattants pour une Algérie libre.
J'en terminerai avec ces vers de Salah GUEMRICHE:
" Ah ! laissez-nous VOIR
Si nos cimetières sont encore DEBOUT
Si nos enfants n'ont plus FAIM,
Si nos maquis n'ont vraiment plus besoin de NOUS
Si nos terres n'ont plus SOIF et si
Si les "SIDI" sont vraiment partis...
Et après çà,
Nous vous promettons
DE NE PLUS CROIRE QUE CE QUE NOUS AURONS
VU,
DE NE PLUS AIMER QUE CE QUE NOUS AURONS
CRU,
Et après çà,
Nous vous jurons
DE N'ÊTRE PLUS QUE NOUS !" ...
À ciao, fraternellement,
NOSE DE CHAMPAGNE