MONDIALISATION & MARCHE AUX VIANDES...
En cette matinée froide et grise de l’Ascension, je me suis extirpé de mon monde virtuel du polar. J’ai fait cet effort dans les sonorités bleues et coulantes de ma dernière acquisition avec John Mayall et ses blues breakers.
En inspectant le fouillis de ma bibliothèque, j’ai retrouvé cette foule de héros plus ou moins fatigués de tous les continents avec lesquels je passe une bonne partie de ma vie lorsque ce n’est pas avec mes chats, mon chien et mon épouse ou mes amis et mes camarades.
Je peux vous dire que, concentrés dans tous ces parallélépipèdes de carton et de papier, çà fait du monde et çà fait aussi un sacré voyage à travers la planète ! Parce que pour les suivre par la lecture, il en faut quelques dizaines d’atlas géographiques de la collection des « guides verts »… Suivez-moi dans l’intimité du Pepe Carvalho de Manuel Vasquez Montalban ou celle du Commissaire Montalbano d’Andrea Camillieri et ses drôles d’adjoints. Ou encore, prenez place aux côtés du Commissaire Van In de Peter Aspe, dans sa voiture, ou celle de Varg Veum de Gunnar Staalesen, ou celle du sheriff-adjoint Carl Houseman dans laquelle crachotte la radio de Donald Harstad, ou encore avec le Kurt Wallander d’Henning Mankell. Vous pouvez aussi prendre l’avion avec Erik Winter de Ake Edwardson, ou le Commissaire Martin Beck de Maj Sjowald et Per Wahloo. Vous pouvez écouter les musiques jazzy ou les blues préférés du Harry Bosch de Michael Connelly ou du Fabio Montale de Jean-Claude Izzo. Si vous le préférer, vous pourrez vous échapper pédestrement au petit matin frais pour photographier les oiseaux sauvages avec son fils sourd et l’Inspecteur Jo Faraday de Graham Hurley et vous protéger un instant des turpitudes humaines, ou observer les changements de la nature et des hommes avec Mat Joubert et Thobela Mpayiphélie de Deon Meyer, ou avec Yudel Gordon, le héro psychologue de Wessel Ebersohn . À moins que vous soyez plus familiers des contradictions du Moyen-Orient et que vous préfériez la compagnie du sarcastique Commissaire Llob de Yasmina Khadra ou du Commissaire Michael Ohayon de Batya Gour… Il vous reste encore à rencontrer le déjanté Harry Hole de Jo Nesbo ou le Jean-Baptiste Adamsberg et ses fêlures, de Fred Vargas… Partout, à travers les villes et leurs vitrines, et leur pendant symétrique des cités où explosent toutes sortes de misères économiques, culturelles et affectives, ces hérauts vous diront les difficultés à vivre des hommes, dans la mondialisation marchande et financières où tout s’achète et tout se vend.
Il faut maintenant que je vous parle de l’un de mes préférés : l’Inspecteur John Rebus, création du romancier écossais Ian Rankin (50 ans cette année). L’inspecteur John Rebus s’est engagé dans la police et il fait consciencieusement et humainement son travail, après avoir « fait » l’Irlande du Nord, comme d’autres (le Commissaire Paco Martinez de Maurice Attia) ont « fait » l’Algérie. Je viens en effet de terminer la lecture de son dernier paru, depuis mars 2010, au « Livre de Poche » (Collection « Policier », N°31726, pour 627 pages). Il est le 17° de ma collection personnelle et porte ce titre qui n’a rien du hasard : « Fleshmarket Close ». Pour aider ceux qui en auraient éventuellement besoin, ce titre évocateur se traduit littéralement ainsi : « Impasse du Marché aux Viandes »… Et ce titre dit tout.
À travers la découverte de deux squelettes scellés dans le béton d’une cave, et aussi l’enquête à propos de l’assassinat d’un journaliste kurde, on s’enfonce (mais rassurez vous c’est en Ecosse, donc toute ressemblance serait purement fortuite !) dans un monde de sans-papiers, de travailleurs clandestins, de demandeurs d’asile et de passeurs très peu altruistes, surtout quand ce sont des gros caïds de la pègre qui se recyclent dans les filières rentables du moment. On fait connaissance avec les dispositifs et les institutions plus ou moins publiques ou privées de prise en charge de ce « cheptel » et qui permettent à la forteresse occidentale de se protéger contre les rêves des malheureux « Damnés de la Terre » de tous les continents et qui ont la faiblesse de croire en la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, et en particulier l’article 13... Cela nous ramène à FRONTEX, cette redoutable officine de chiens de garde de la Communauté Européenne (où siège « l’humaniste démocrate-chrétien » Jacques Barrot en notre nom) que nous finançons tous, parfois malgré nous et dont Pédro nous a fait passer par courriel récemment, l’effrayant « dépliant publicitaire ». Dans ce livre de Ian Rankin, on en croise quelques éléments avancés et on mesure leur efficacité grâce aux moyens qu’on n’a pas mis en œuvre pour résorber les poches de pauvreté telles que le quartier de Knoxland!
Voilà donc, car je n’en dirais pas plus pour vous permettre de découvrir ce livre auquel RESF fait également référence. À bientôt à tou-te-s et fraternité de votre,
NOSE DE CHAMPAGNE.